La maîtrise de la consommation électrique, un enjeu économique pour les abonnés aux compteurs à prépaiement au Niger
Dr Abdou Tankari Mahamadou, 02 Août 2023
Contexte d’usage des compteurs électriques
Dans les pays du Sud, et particulièrement en Afrique, les compteurs à prépaiement sont de plus en plus déployés par les gestionnaires de réseaux électriques afin de réduire les impayés des factures. C’est aussi un moyen de sensibiliser les usagers sur les coûts de l’électricité bien qu’il génère en même temps des tensions entre usagers et fournisseur. En effet, le mode de tarification avec différentes tranches de consommation ainsi que des frais fixes mensuels a fortement perturbé les consommateurs qui ont besoin de stratégies pour optimiser leurs factures.
Il existe différentes technologies de compteurs électriques, ils peuvent être individuels ou collectifs, monophasés ou triphasés, électromécaniques ou électroniques, en post ou en prépaiement, communicants ou non.
L’un des challenges dans le cas d’un prépaiement de facture d’électricité repose sur la capacité de l’usager à avoir une bonne connaissance de ses consommations mensuelles pour définir le coût et la fréquence de ses achats en prépaiement. Des achats aléatoires de crédits et une consommation non maitrisée ni planifiée conduit à des surcoûts très importants, en plus du sentiment (pas toujours justifié) d’être spolié par le fournisseur.
Illustration de l’impact de la fréquence d’achat sur le coût final
Pour illustrer un aspect de la problématique de la recharge des crédits en prépaiement, considérons un abonné dont la consommation régulière mensuelle est de 150kWh (Tableau 1). Dans le cas d’un post-paiement, l’abonné devrait payer chaque mois la somme de 12 483,5 Fcfa, soit 149 802 Fcfa/an. Avec un compteur à prépaiement, Il paierait la même somme de 149 802 Fcfa/an, avec en sus les frais de service additionnel de 200 Fcfa par recharge en cas d’achat mensuel de crédit (2 400 FCFA/an). Par contre, s’il procède à un achat bimestriel, il déboursera au premier achat la somme de 29 266,37 Fcfa, avec un surcoût du fait d’un changement de tranche, à laquelle il ajoutera au prochain achat la somme de 1 478 FCFA correspondant aux charges fixes et taxe d’habitation du mois intermédiaire. Ainsi, tous les deux mois, le coût à payer pour 300kWh est de 30 744,37FCFA/mois, soit un coût annuel de 184 466,22 FCFA/an, sans les frais de service de vente des crédits. Dans le cas d’un achat trimestriel, le coût à débourser est estimé à 52 734,07 FCFA au premier achat. Au prochain achat (quatrième mois), les frais fixes équivalents aux deux mois intermédiaires doivent être remboursés (2 956 FCFA), soit un coût cumulé de 222 760,28 FCFA/an.
Tableau 1 : Analyse comparative des coûts annuels d’électricité pour un abonné selon la fréquence d’achat de crédit pour une consommation mensuelle constante.
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Consommation mensuelle moyenne |
Coût en Fcfa |
Ratio1 |
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Mensuel |
Annuel |
||
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150 kWh |
12 483,5 |
149 802 |
1,00 |
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300 kWh |
29 266,37 |
184 466,22 |
1,23 |
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450 kWh (Fcfa) |
52 734,07 |
222 760,28 |
1,48 |
Par ailleurs, d’autres paramètres non scientifiques apparaissent dans la problématique de la facturation électrique et qui renchérissent les coûts d’accès à l’énergie pour les petits consommateurs.
Cas d’une sous-exploitation des compteurs
La figure 1 a été établie à partir des factures fournies par un abonné disposant de deux locaux avec chacun un compteur en post-paiement. Elle présente la part de la redevance mensuelle (taxes diverses et location compteur) sur la facture d’électricité qui varie de 20% à 100 % (aucune consommation électrique dans le mois).
A titre indicatif, le prix du kWh TTC varie entre 83.22 et 131.82 Fcfa pour un abonné résidentiel consommant entre 150kWh et 450kWh/mois.
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Figure 1 : Part des redevances mensuelles sur des factures réelles d’un abonné disposant de deux compteurs individuels en post-paiement. |
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Ainsi, la maîtrise des usages et de la tarification de l’électricité est un enjeu important de l’efficacité des systèmes énergétiques pour toute taille d’installation. Dans une situation de crise et de capacité insuffisante du réseau, l’abonné qui optimise sa consommation électrique pourrait réaliser des économies et permettre au fournisseur d’électricité (Nigelec pour le Niger) de desservir un plus grand nombre d’abonnés.
Les abonnés intéressés à simuler pour mieux comprendre leur facture et optimiser leurs consommations peuvent utiliser un outil en ligne d’optimisation et d’aide à la décision que nous mettons à disposition, et adapté pré ou post-paiement. Il est accessible gratuitement au lien suivant (en renseignant votre email, vous recevrez une copie du rapport de simulation) : https://saheldurable.info/optimiser-mes-options-dachat-de-credit-delectricite/
Mieux maîtriser sa consommation électrique en prépaiement ?
Il est indispensable de faire un bilan régulier de vos consommations afin de déterminer votre consommation annuelle totale, identifier les mois et valeurs des consommations minimale et maximale. Cela vous permettra d’estimer le montant du crédit mensuel à acheter afin d’optimiser votre coût électrique annuel. De mon point de vue, un achat mensuel est le plus indiqué, de montant quasi constant permettant un report d’une partie sur des mois de plus faible consommation, afin de satisfaire le besoin annuel. L’on pourrait être amené à procéder à un lissage des pics de consommations afin de rester dans les tranches optimales, lorsque la différence n’est pas significative.
Le citoyen, acteur du renouvelable
Le Niger est un des pays les plus ensoleillés au Monde et l’exploitation de ce potentiel est assez timide, quasi inexistant. Malgré les constructions récentes de plusieurs centrales solaires connectées au réseau ou hybrides autonomes, le taux de pénétration des énergies renouvelables reste assez bas et le Niger ne tire pas grand profit des avantages du solaire. Pour cela, comme nous l’avions déjà mentionné en 20191, l’implication des citoyens à travers l’autoproduction électrique raccordée au réseau est un vecteur puissant d’accélération de la couverture électrique, de réduction des coûts d’accès aux populations et d’amélioration de la disponibilité énergétique du réseau de la Nigelec. Autonomiser les grandes villes, notamment la capitale Niamey, par un usage massif de l’énergie solaire, contribuera à la souveraineté nationale, notamment en périodes de crises. Par contre, sa mise en œuvre requiert une réelle volonté politique à travers, entre autres, l’adaptation et la mise en œuvre pratique des textes règlementaires existants.
Remerciements
Je tiens à remercier tous ceux qui ont contribués à alimenter l’étude en répondant à nos questions et en mettant à disposition leurs factures électriques.
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